L’erreur initiale de l’homme est d’appliquer abusivement pour des raisons historiques et pragmatiques un principe général, supérieur régissant la loi de la nature.
Non que ces lois soient fausses, mais le raisonnement jusqu’au boutisme a amené les erreurs. Et surtout de penser que l’esprit humain et l’homme était le centre de tout.
Ce principe s'applique, dans sa Méthode, à tout: à la création de l'univers qui ne vient pas d'en-haut, comme à la nature de la nature (CF. https://zeboute-infocom.com/2014/02/20/edgar-morin-la-methode-complexite-nature/):
« L’adaptation nous apparaît comme l’effet de l’aptitude d’un être vivant non seulement à subsister dans des conditions données mais aussi à constituer des relations complémentaires et/ou antagonistes avec d’autres êtres vivants, à résister aux concurrences / compétitions et à affronter des événements aléatoires propres à l’écosystème dans lequel il s’intègre ».La formation de l’univers n’a pu permettre la création du carbone parce qu’une contrainte forte de l’environnement l’a permis. Les turbulences thermiques monstrueuses, la chaleur énorme à ce moment là a permis d’accélérer le désordre et d’augmenter les chances du mouvement entre les trois noyaux d’hélium.
C’est de ce désordre qu’a pu naître la stabilité du carbone.
Dans cet exemple, on distingue ainsi :
– un désordre monumental
– un processus de formation improbable, au départ.
– un équilibre d’un corps, le carbone.
Le carbone n’est rien à l’origine. Il devient un système stable, généré par le désordre et les éléments isolés, répulsifs.
On explique ainsi qu’à partir du désordre, on construit un ordre, naturel, équilibré de l’extérieur, par une intéraction.
Il y a eu ici génération et non une loi générique qui aurait forcé les éléments à se construire.
La formation ne vient pas « d’en haut », mais « d’en bas » ; par les particules élémentaires et le désordre.
On est là dans la spéculation pure, dans les présupposés de la Méthode, donc dans de la philosophie. Tout vient d'en-bas, de l'auto-organisation de la matière et de la vie, et rien ne vient d'en-haut, à savoir d'une intelligence créatrice ou d'une essence extérieure. Tout vient d'en-bas, du chaotique qui cherche un équilibre: cette dimension est aussi la nôtre en la tension entre nos pulsions de vie et de mort d'où sort parfois le meilleur, souvent le pire. L'avenir reste incertain sans qu'il faille présupposer automatiquement la catastrophe. Nous nous dirigeons vers deux futurs antinomiques mais inséparés : l'un « catastrophique » et l'autre « euphorique ».
L’importance
du fantasme et de l’imaginaire chez l’être humain est inouïe ; étant donné que
les voies d’entrée et de sortie du système neurocérébral, qui mettent en
connexion l’organisme et le monde extérieur, ne représentent que 2% de
l’ensemble, alors que 98 % concernent le fonctionnement intérieur, il s’est
constitué un monde psychique relativement indépendant, où fermentent besoins, rêves,
désirs, idées, images, fantasmes, et ce monde s’infiltre dans notre vision ou
conception du monde extérieur.
Il
existe de plus en chaque esprit une possibilité de mensonge à soi-même qui est
source permanente d’erreurs et d’illusions.
L’égocentrisme,
le besoin d’autojustification, la tendance à projeter sur autrui la cause du
mal font que chacun se ment à soi-même sans détecter ce mensonge dont il est
pourtant l’auteur. Notre mémoire est elle-même sujette à de très nombreuses
sources d’erreurs. Une mémoire, non régénérée par la remémoration, tend à se dégrader,
mais chaque remémoration peut l’enjoliver ou l’enlaidir. Notre esprit,
inconsciemment, tend à sélectionner les souvenirs qui nous sont avantageux et à
refouler, voire effacer, les défavorables et chacun peut s’y donner un rôle
flatteur. Il tend à déformer les souvenirs par projections ou confusions
inconscientes. Il y a parfois de faux souvenirs qu’on est persuadé avoir vécus,
comme des souvenirs refoulés qu’on est persuadé n’avoir jamais vécus. Ainsi, la
mémoire, source irremplaçable de vérité, peut-elle être sujette aux erreurs et
aux illusions.
Le paradigme cartésien disjoint le sujet et l’objet, avec pour chacun sa sphère propre, la philosophie et la recherche réflexive ici, la science et la recherche objective là. Cette dissociation traverse de part en part l’univers : Sujet / Objet. Âme / Corps. Esprit / Matière. Qualité / Quantité. Finalité / Causalité. Sentiment / Raison. Liberté / Déterminisme. Existence / Essence.
Cette dissociation se retrouve aussi dans notre nature profonde: "L’amour prend figure dans la rencontre du sacré et du profane, du mythologique et du sexuel. Il sera de plus en plus possible d’avoir l’expérience mystique, extatique, l’expérience du culte, du divin, à travers la relation d’amour avec un autre individu.
Alors, être rationnel, ne serait-ce pas comprendre les limites de la rationalité et de la part de mystère du monde ? La rationalité est un outil merveilleux, mais il y a des choses qui excèdent l’esprit humain. La vie est un mixte d’irrationalisable et de rationalité.
On ne peut pas vivre sans mythes, et j’inclurai parmi les « mythes » la croyance à l’amour, qui est un des plus nobles et des plus puissants, et peut-être le seul mythe auquel nous devrions nous attacher. L’amour fait partie de la poésie de la vie. La poésie fait partie de l’amour de la vie. Amour et poésie s’engendrent l’un et l’autre et peuvent s’identifier l’un à l’autre. Si l’amour est l’union suprême de la sagesse et de la folie, il nous faut assumer l’amour. Si la poésie transcende sagesse et folie, il nous faut aspirer à vivre l’état poétique, et éviter que la prose n’engloutisse nos vies, qui sont nécessairement tissées de prose et de poésie.J’aimerais parler dans le cas de la poésie de ce que Georges Bataille appelait la « consumation », c’est-à-dire le fait de brûler d’un grand feu intérieur, opposé à la consommation, qui est un phénomène de supermarché. Il faut accepter la « consumation », la poésie, la dépense, le gaspillage, une part de folie dans sa vie… et c’est peut-être cela la sagesse. La sagesse ne peut être que mélangée à la folie.
La sagesse doit savoir qu’elle porte en elle une contradiction : il est fou de vivre trop sagement. Nous devons reconnaître que dans la folie qui est l’amour, il y a la sagesse de l’amour. L’amour de la sagesse – ou philosophie – manque d’amour. L’important dans la vie, c’est l’amour. Avec tous les dangers qu’il comporte."D'autres explications sont possibles, y compris des hypothèses venues d'en-haut, même si elles ne seront plus émises dans le langage religieux d'antan. Elles ont été formulées par Philippe Guillemant ou par Nassim Haramein. La folie de l'amour peut y être lue dans un contexte plus grand que le matérialisme de Edgar Morin...La vie ne s'y réduit pas à une oscillation entre la tragédie de notre folie (la raison) et la comédie de nos amours (les sens). Il pourrait y avoir une tragi-comédie dans une Présence d'amour venue d'en-haut à repenser dans des catégories plus modernes, cela va de soi. Ce presque rien ineffable échappe à la raison comme à toute main mise mais il est attesté par des aptitudes de la conscience: des sorties de corps (OBE), des états modifiés de conscience (EMI) ou encore des expériences de mort imminente (EMI) qui démontrent la nécessité de postuler des dimensions supplémentaires aux 4 de notre univers. Le mystère s'éclaircit alors autant qu'il s'épaissit dans une conciliation rendue nécessaire de l'en-bas et de l'en-haut...