Est-ce à dire que tout est relatif, que tout se vaut, que tout est subjectif...voire même que tout est vain? Donner sens à la vie fait partie intégrante du métier d'humain, du vrai courage: vouloir s'y soustraire serait du plus haut comique, le faire sans humilité sera du plus haut tragique. La prétention à détenir la vérité conduit invariablement aux pires catastrophes: notre histoire humaine en témoigne. Mieux vaut faire avec des vérités partielles, singulières et révisables... Ici, le vrai courage sera celui d'oser être soi-même...Comment y arriver? Les recettes seront forcément diverses et variées. Toutes pourtant vont devoir intégrer le paradoxe signalé par Thierry Tournebise: nous sommes enclins
en même temps « à nous protéger des autres
pour parvenir à être Soi, et à en avoir besoin...car sans eux, le Soi ne trouve
pas sa place. » Le chemin sera le but: vivre « c'est sentir la vie en soi et autour de soi, c'est se percevoir et
percevoir autrui. C'est savourer le bonheur de sentir palpiter l'existence dans
ce qu'elle a de plus précieux et de plus intime. Qu'il s'agisse de peines ou de
joies, ça palpite, ça se montre, ça se partage, ça se rencontre... »; ça se vit en somme dans l'équilibre entre l'extériorité et
l'intériorité. Comment y arriver ? Cela réclame, bien évidemment, un
apprentissage et un travail sur soi-même. Nous aurons à repérer notamment nos
attachements excessifs à des êtres, des biens matériels, à des attentes, des
espoirs qui ne manqueront pas d'être une source de douleurs et de souffrances.
Sentir la vie en soi et autour de soi exige une adaptation permanente : il
s'agit de se remettre constamment dans la cible et donc de se dégager de ce qui
pourrait compromettre cette noble intention.
Le pari de l'honnêteté:
- Par ailleurs, être honnête avec soi-même c'est aussi avoir le courage de proposer ce que l'on
a de meilleur à l'autre : nos passions, nos expériences, nos compétences sans
se soucier de la manière dont cela va être considéré, regardé ou apprécié.
- En pratiquantl’honnêteté
envers soi-même et les autres jour après jour, le stress diminue de même que les contrariétés, les frustrations, les angoisses , les ressentiments, les peurs d'avoir à porter un masque, à jouer un rôle ou à faire semblant. L'honnêteté est l'envers de l'hypocrisie: elle réclame des approches spécifiques (In http://www.psycho-bien-etre.be/psycho/hypocrisie )
En osant dire non, lorsque nous
ressentons que le oui va à l’encontre de nos besoins, nos valeurs.
Cesser de critiquer les autres et
particulièrement le/les personne absentes
Cesser de reporter sur autrui, la
responsabilité de nos actes, décisions, expériences, perçues, vécues,
comme négatives.
Oser accorder et maintenir des relations
sincères plutôt que maintenir des relations par peur de ne pas/plus être
aimé, du rejet, de l’abandon…
En osant exprimer le meilleur de
nous-mêmes, nos envies, nos besoins pour être fidèle et respectueux
vis-à-vis de soi.
Nous exprimer avec sincérité et humilité
et non pour se faire remarquer, par conformisme, pour plaire à autrui.
Etre honnête avec soi-même, nos valeurs
pour être honnête, loyal avec autrui.
Etre soi, et non « jouer un rôle » pour
plaire, ne pas décevoir.
Etre Acteur/Responsable de nos choix,
décisions, actes, y compris dans nos relations
Etre bienveillant et respectueux avec
soi-même, par son authenticité, pour être bienveillant et respectueux
vis-à-vis d’autrui
Nelson Mandela résumait ainsi le courage de la vie spirituelle: "L'honnêteté, la sincérité, la simplicité, l'humilité, la générosité, l'absence de vanité, la capacité à servir les autres - qualités à la portée de toutes les âmes- sont les vélitables fondations de notre vie spirituelle. "
Voici une manière d'y parvenir:
Mais est-ce aussi simple? Suffit-il de vouloir bien prendre soin de soi? De bien se positionner face à tous et à tout? L'effort volontariste est-il la panacée? Il l'est et le sera si nous postulons qu'il n'y a aucune aide transcendante, que tout dépend de nous et de nous seuls. Il faut alors faire preuve d'ingéniosité et de persévérance.
Rêver la vie
Pour le psychiatre Frédéric Fanget, rêver
d’un avenir meilleur nous désenglue de notre histoire et nous pousse vers
l’avant. Mais à l’inverse, tout miser sur le futur rend le présent infertile. A
tout remettre à plus tard, nous ne construisons rien. C’est ce que l’on appelle
la procrastination. Elle est le propre des grands angoissés qui redoutent les
conséquences de leurs décisions. Ils ne se marient pas parce que ce n’est pas
le partenaire idéal, ne font pas d’enfant parce qu’ils ne sont pas prêts,
refusent du travail parce qu’ils n’ont pas trouvé leur voie… En ce sens, ils
sont très proches des perfectionnistes, mais leur incertitude les paralyse. Or
le bonheur n’advient pas tout seul, il faut le bâtir pas à pas, par
améliorations successives. Réfléchir à la direction que l’on donne à sa vie est
indispensable pour ne pas être dans l’errance. Mais parfois, il faut aussi
savoir arrêter de se poser des questions pour vivre, tout simplement. Instant après instant, pas à pas.
Ou arrêter de vouloir tout contrôler.
Un homme mourant du cancer nous disait : « Si je pouvais refaire ma vie, j'essaierais de faire
plus d'erreurs. Je n'essaierais pas d'être aussi parfait. Je serais moins sage
que je ne l'ai été au cours de ce voyage-ci. En fait, il y a, je le sais
maintenant, très peu de choses que je prendrais au sérieux. Je serais plus fou,
je serais moins hygiénique. Je prendrais plus de chances, je ferais plus de
voyages, j'escaladerais plus de montagnes, je nagerais dans plus de rivières,
je regarderais plus de couchers de soleil, j'irais à plus d'endroits où je ne
suis jamais allé. Je mangerais plus de crème glacée et moins de haricots.
J'aurais plus de problèmes réels et moins d'imaginaires. J'ai été, voyez-vous,
un de ceux qui vivent avec retenue et sainement, heure après heure et jour
après jour. Oh ! j'ai aussi eu du bon temps, et, si je devais recommencer, j'en
aurais plus encore, en fait, j'essaierais même de n'avoir que du bon temps.
J'ai été un de ces gens qui ne vont nulle part sans un thermomètre, une
bouillotte, de quoi faire des gargarismes, un imperméable et un parachute. Si
je devais recommencer, je voyagerais cette fois avec bien moins de bagages. Si
je devais tout recommencer, je me mettrais nu-pieds plus tôt au printemps et je
le resterais jusqu'à plus tard en automne. J'enfourcherais plus de manèges, je
regarderais plus de levers de soleil et je jouerais avec plus d'enfants, si je
devais revivre ma vie, mais, voyez-vous, tout est fini pour moi, mais vous, ne
faites pas les mêmes erreurs que moi. »
L'erreur est ailleurs aussi
En réalité, le problème ne peut pas être situé simplement et uniquement dans notre positionnement face au monde, aux autres, face à nos rêves et attentes. Nous souffrons certes d'un attachement excessif au monde et aux autres, mais nous sommes aussi fâchés avec le divin. Pourtant, la foi chrétienne est une manière de rêver la vie, de postuler un avenir meilleur avec l'aide divine, mais cela ne peut se faire sans quitter l'hypocrisie bien connue résumée ci-dessous:
Nous trouvons dans la tradition biblique une invitation à dépasser l'hypocrisie. En voici quelques exemples: - Ne m’entraîne pas dans la ruine des méchants et des hommes injustes ! Ilsparlentdepaix à leur prochain, et ils ont la méchanceté dans le cœur…(Ps. 28:3).
- « Qu’as-tu à regarder
la paille dans l’œil de ton frère, alors que la poutre qui est dans ton œil, tu
ne la remarques pas ? Comment vas-tu dire à ton frère : “Laisse-moi retirer la
paille de ton œil”, alors qu’il y a une poutre dans ton œil à toi ? Esprit faux
! Enlève d’abord la poutre de ton œil, alors tu verras clair pour retirer la
paille qui est dans l’œil de ton frère » (Mt 7, 3-5).
- « Que votre
amour soit sans hypocrisie. Fuyez le mal avec horreur, attachez-vous au bien »
(Rm 12, 9).
Un hypocrite est un « acteur » (c’est le
sens du mot en grec classique). Quelqu’un qui prétend être ce qu’il n’est pas.
Qui prétend être parfait et qui ne l’est pas. Qui prétend savoir alors qu’il ne
sait pas. Qui prétend avoir une vie de prière alors qu’il ne l’a pas. Ce à quoi Jésus appelle les croyants, c’est à être une
communauté de mendiants spirituels, de gens qui cessent de tout ramener à eux seuls et posséder richesse, pouvoir et savoir. Parce
qu’Ils savent qu’ils sont pécheurs, qu’ils savent qu’ils ont besoin de grâce du pardon divin.
Ils peuvent être des gens honnêtes les uns envers les autres, en partenariat avec le maître pour apprendre de Lui l'amour fraternel…Comme l'écrit fort justement Laurent Gagnebin, « Le centre
de gravité de la foi chrétienne n’est pas le drame rédempteur de notre
dogmatique, mais la venue du Royaume de Dieu en notre cœur et dans le monde. Pour
moi, le St- Esprit c’est d’abord la réalité de cette force divine qui nous
inspire et nous habite, nous anime et nous porte, pour construire ce Règne de
Dieu en nous orientant vers demain et non vers un passé centré sur une Croix
dépassée. Le Saint
Esprit, c’est Dieu en nous et dans ce « nous », je suis prêt avec Schweitzer à
voir non seulement les humains, mais aussi le monde minéral, animal, végétal ;
un monde cosmique. Ce Dieu en nous c’est l’au-delà (dans l’espace et le temps)
du Dieu avec nous, Emmanuel.» Cet au-delà nous convie à une bien-traitance appelée l'amour fraternel. Dans une approche saine, de respect d’autrui, au sens de Jésus, de la
non-violence aussi, nous devons interagir au niveau des valeurs. Voici comment Thierry
Tournebise en parle de façon géniale. Savoir recevoir la vie émanant
de l’autre, donne une place à cette vie en lui. Il s’agit finalement de cette
validation du « bon en soi présent et à venir », comme nous le propose Veldman. Par la « validation
existentielle », nous satisfaisons à ce besoin essentiel d’existence, d’estime
de soi et d’amour (besoin ontique). Cela permet d’examiner tout le reste avec
plus de sérénité, plus de confiance et même plus d’autonomie. Il s'agit de privilégier
l'émergence: Quoi qu’il se soit passé, il veille tout particulièrement à ne
rien abimer et se gardera de toute culpabilisation de qui que ce soit. De
garder une faculté d'émerveillement. C'est le véritable courage, l'élégance dans la bien-traitance qui en appelle au respect mutuel... Jamais imposé mais toujours choisi !
Quand tout est grâce...
Cadeau, de quoi allons-nous nous vanter? François Vouga nous donne une clé d’interprétation
quand il fait dire à Paul que tout est grâce. En premier lieu la justification
par la foi (Rom 5.2), qui est l’œuvre de Dieu en nous, est une grâce. La foi
est reçue, ce qui interdit tout mérite, ôtant à l’homme la possibilité de se
glorifier notamment de ses œuvres. C’est par grâce que nous sommes sauvés, par
elle aussi que nous pouvons œuvrer au service du Seigneur, qu’il y a diversité
de dons, de charismes et de ministères au sein de la communauté des croyants.
Et, bien sûr, nous sommes invités à rendre grâce pour les bienfaits divins. Le
« tout est grâce » vient ici compenser de manière satisfaisante
toutes les références archaïques de Paul, au Dieu de colère devenu inutile, à
la notion de rachat liée au sacrifice de Jésus ou encore à celle du jugement
dernier. Tout est grâce imméritée ! Ce qui revient à dire aussi que tout
est don pour autant que nous puissions laisser
Dieu nous être favorable.La grâce est alors le résultat de l’imprégnation de
notre futur par notre Esprit en action rempli d’Amour. Elle ouvre un chemin
inédit qui ne dépend pas d’un mérite humain, mais bien plutôt de cet
Amour-pluie appelé à devenir notre réalité et notre façon d'interagir avec le divin. Voici comment le pysicien Philippe Guillement schématise cette interaction:
Plus cette dimension de l'Eveil sera présente, et plus nous pourrons y goûter dans une joie
anticipatrice, l’observer dans notre vie et autour de nous. Elle est le ciment
interrelationnel et l’anticipation de cette réconciliation pleine et entière à
laquelle aspire toute la création. Et sous forme de pluie, elle est, comme
l’écrivait François Vouga, don d'amitié, don de bienveillance, don de sagesse,
don de prière, don de gaieté, don de parole, don de discernement, don de
générosité, don de patience, don d'improvisation, don d'écoute, don
d'organisation, don d'intelligence, don de disponibilité ; c'est pourquoi nous
portons le souci les uns des autres ; si un membre souffre, nous
partageons sa souffrance ; si un membre est dans la joie, tous se
réjouissent. « La grâce est désormais, s’il est permis de risquer un paradoxe, la
loi sous laquelle il nous est donné de vivre et de laquelle toute notre
condition humaine reçoit ses impulsions et son style. Gratuité absolue, Amour
inconditionnel de Dieu, elle est l’Amour qui libère l’homme pour l’Amour, la
gratuité qui le libère pour la reconnaissance (C.
Senft, Jésus de Nazareth et Paul de Tarse, éditions Labor et Fides 1985, p.97.)» La grâce postule la gratuité divine - et la nôtre aussi - la reconnaissance, l'émerveillement de nous savoir aimés sans condition, objet et sujet du libre arbitre: rien se fait sans notre accord, rien n'est arraché ni imposé, notre liberté est entière avec néanmoins la possibilité d'interagir avec l'Univers qui lui aussi peut nous être favorable: nous lui devons toutes ces intuitions, prémonitions, inspirations, tous ces heureux hasards, ces coïncidences et ces synchronicités. Dans cette interaction, nous sommes partie de Dieu, Dieu faisant l'expérience de lui-même non plus dans la perfection, l'absolu mais dans le relatif. En lui, dans cette dimension humaine et divine, nous pouvons expérimenter "L'honnêteté, la sincérité, la simplicité, l'humilité, la générosité, l'absence de vanité, la capacité à servir les autres " dont nous parlait Nelson Mandela...Et dans cette aventure spirituelle, oser changer nos représentations de la réalité bien trop conditionnées par un déterminisme scientifique périmé. Ces nouvelles approches sont présentées de manière plus détaillée dans les menus et sous-menus intitulés la physique de la conscience et tout est un.