![]() | Il va falloir sortir du mortifère ! Le vouloir intensément et rester dans ce désir même quand les vents son contraires, quand tout semble vain, se valoir, être relatif, injuste ou insensé. Un Inconnu disait déjà au XIVe s. : « Ce n'est point ce que tu es ou ce que tu as été, que Dieu regarde avec les yeux de la miséricorde, mais ce que tu as désir d'être. » Cela demande une écoute attentive : ce désir d’être parle en nous et autour de nous ! « N'est-il pas à chercher dans ce qui raconte l'advenir de l'humain, les contes et les mythes, tout particulièrement ceux qui nous font aller vers où commence l'humanité nouvelle ; ils seront transgression de l'apparence, sortie de la réalité, subversion créatrice en cette tendresse qui accueille tout humain au sein de la vie, en laissant l'homme crucifié dans l'en-bas (Maurice Bellet). » |
Se déconditionner ou se re-conditionner autrement. En se souvenant notamment de l'emprise de l'irrationnel sur nos vies.
(1) L’Autre Dieu, la Plainte, la Menace et la Grâce,
Petite bibliothèque de spiritualité, Labor et Fides 2014, p.67.
Le saut qualitatif de la foi dans la confiance est en même temps aveu d'impuissance radicale : personne ne peut se rendre acceptable par une image idéale de soi ! C'est impossible, ça ne marche pas ! Ça conduit à une vie de mensonge, de devoir ou d'imposition…Le choix est plutôt à faire dans le dégagement de la Plainte, de la Menace vers la Grâce. Avoir une image idéale, la chercher, se la donner, la construire, la fourguer dans l'espoir de se rendre acceptable, c'est la figure cachée du désespoir campée dans le mensonge ou l'imposition…Le Royaume des cieux ressemble à une personne qui se rend
compte qu'elle ne viendra jamais à bout de ce qui pèse - la faute, la
culpabilité et le perfectionnisme -, qu'elle n'atteindra jamais une image
idéale d'elle-même qu'elle croyait nécessaire pour se rendre acceptable. Elle accueille alors son impuissance radicale ; elle s'ouvre ainsi à l'avenir, à la nouveauté. à l’autre/Autre avec confiance et gratitude ; elle renonce à expier son malheur par une vie de devoir ou de mensonge qui exige que nous donnions toujours le change. Ici, la dynamique de guérison est bien une résurrection : laisser venir le courage d'oser être soi-même avec ses ombres et ses lumières en faisant face aux autres. Nous voici libérés de notre passe-temps favori, de ce à quoi nous tenons tant : la faute, la culpabilité, le perfectionnisme issu du désir féroce de s'auto-justifier par le méritant-méritoire (la quête de tout ce qui pourrait nous apporter plus de mérites et de valeur personnelle). Nous avons à entendre
pourtant que notre culpabilité est relâchée, congédiée, que nous pouvons la
laisser partir et du coup faire de même envers les autres. Mais cela réclame de
se dé-centrer en réponse à une autorité supérieure…L'autre, mon semblable, n'est pas, plus TOUT : il est faillible comme moi! De même, JE ne suis pas TOUT ! Je peux être toutefois prisonnier du mensonge ou de l'imposition, en quête d'une sécurité illusoire; l'autre est comme moi embourbé dans la recherche éperdue de sécurité, de confort, de pouvoir, de gloire, de jouissances à tout-va ! Et cette quête nécessite de passer en premier ! Ce qui exclut l'amour fraternel car ce dernier est cadeau, don, jamais il ne peut être obtenu par une obligation
! Par l'usage de la force, celle de la contrainte, par des pressions psychologiques, du chantage affectif, par le mensonge, la ruse, la manipulation, la séduction, etc. Ce sont autant de mécanismes ordinaires qui génèrent de la frustration, du ressentiment, de l'angoisse, de la violence adaptative ou réactive, du mal-être en somme. Cette certitude mène à la joie divine, au grand désir que tout soit sauf en tous, par cet Accueil où chacun va comme il peut, d'où il est, comme il est, sans crainte ni désespoir, un humain parmi les autres. Naître là, dans cette Plénitude est lutte pour maintenir le désir que tout soit sans rudesse ni violence vécue dans la patience d'avancer à son pas comme dans le refus de (se)faire violence.Oser être soi-même avec ses ombres et ses lumières, sans
rien vouloir cacher ni imposer à l'autre/Autre, c'est un état de grâce et de liberté retrouvé.
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